Des drones pour effectuer le bilan de santé de l’Amazone

Édition sur la durabilité

par Christina Phillis

L’Amazonie est une vaste région difficile à naviguer, alors vérifier sa santé peut être un défi. Elle traverse huit différents pays et représente la moitié des forêts tropicales restantes de la planète. C’est pour cette raison qu’une équipe de scientifiques du « John A. Paulson School of Engineering and Applied Sciences » (SEAS) de Harvard s’est tournée aux drones à haute altitude pour faire le suivi du bien-être de cette importante ressource.

Une planète sous menace

La santé de la planète et la forêt amazonienne sont invariablement liées. Tandis que la déforestation continue, davantage de monoxyde de carbone nocif reste dans l’atmosphère au lieu d’être converti en oxygène. Ceci sert à aggraver les effets des changements climatiques qui à leurs tours, endommagent davantage la forêt tropicale.

Un moyen de suivre la réponse de ces plantes aux changements climatiques est de surveiller leurs signaux chimiques. Chaque espèce de plante émet des composés organiques volatils (COVs) qui les aident à interagir avec d’autres organismes. Lorsqu’une plante réagit au stress, ces signaux peuvent changer.

« Les plantes et les insectes communiquent souvent par la signalisation chimique, plutôt que par la signalisation visuelle ou vocale plus répandue parmi les animaux, » a dit Scot Martin, le professeur Gordon McKay de sciences environnementales et d’ingénierie au SEAS. « Avec nos capteurs chimiques, nous pouvons mieux comprendre le fonctionnement actuel de la forêt et comment elle change selon le climat régional instable, incluant la présence fréquente dans les dernières années d’incendies dans la partie centrale de l’Amazonie. »

Même les arbres des régions plus froides du monde émettent des niveaux élevés de terpènes lors des hausses de température. Quand les COVs des plantes entrent dans l’atmosphère, ils peuvent réagir avec les produits chimiques existants pour former des aérosols, contribuant ainsi encore plus à la pollution de l’air. Une hausse de pollution atmosphérique mène aux températures plus élevées que la normale et les plantes sous stress émettent des COVs. C’est un cercle vicieux.

Jusqu’à maintenant, la surveillance de la santé de l’Amazone a été accomplie en utilisant des plateformes qui s’élèvent au-dessus de la forêt.

« L’Amazone contient des milliers de petits écosystèmes, chacun avec leurs propres biodiversités et signaux de COV, » a dit Jianhuai Ye, stagiaire postdoctoral au SEAS. « Par contre, il y a moins de 10 de ces plateformes à travers la forêt entière et elles sont toutes bâties dans des écosystèmes similaires où le sol peut supporter de grandes structures. Comme vous pouvez l’imaginer, ceci mène à un certain biais dans les données. »

L’équipe, qui comptait des collaborateurs de l’« Amazonas State University » (UEA) et l’« Amazonas State Research Support Foundation » (FAPEAM), croyait qu’elle pouvait recueillir des données plus précises en utilisant un système de surveillance chimique à base de drone. Les drones pourraient collecter des échantillons de COVs à une variété d’altitudes et de points stratégiques. Utilisant des matériaux légers, les drones pourraient résister à la chaleur et à l’humidité de la jungle.

Prendre son envol

En été 2018, l’équipe a utilisé leurs drones spécialement conçus pour recenser l’empreinte chimique de deux différents écosystèmes au centre de l’Amazonie. Leurs résultats, publiés dans le « Proceedings of the National Academy of Sciences », a contesté les modèles courants, qui présument que les écosystèmes avoisinants avaient les mêmes émissions.

« Cette recherche souligne à quel point nous savons peu sur l’hétérogénéité des forêts. »

Les chercheurs ont piloté leurs drones au-dessus des forêts de plateau et des forêts escarpées et ont trouvé une différence importante dans les COVs de ces deux endroits. La forêt de plateau avait des concentrations 50 % plus élevées d’isoprène que la forêt escarpée. Le modèle qu’ils ont développé basé sur ces données suggère que les émissions d’isoprène doublaient et même triplaient parmi ces sous-types de forêts. Les modèles d’émissions antérieurs présumaient aucune différence.

« Cette recherche souligne à quel point nous en savons peu sur l’hétérogénéité des forêts, » a dit Martin. « Mais les technologies assistées par drones nous aident à comprendre et à quantifier les émissions de COV dans des écosystèmes avoisinants, mais différents afin de mieux les représenter dans les simulations modèles de climat et de la qualité de l’air. »

L’équipe a continué ses recherches à l’automne 2019, cette fois en observant les vallées et les rivières de l’Amazonie. À l’avenir, ils prévoient le test d’une flotte de trois drones opérés en simultané. Tandis que les changements climatiques restent un problème grave, cette technologie nous aidera à réellement comprendre ses effets étendus.

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Reference